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Catégorie : Régates 2010-2014
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"MON JOUR DE CHANCE 2011"

PREMIERE EXPERIENCE DES 24 HEURES DES ANDELYS

Récit vécu par Didier Riand et Didier Gourdaut

 

 

 

Samedi  matin, je prépare mon Maraud (TEURA), dans l’attente de mon équipier qui arrive vers 10 heures.
Mon équipier est le n° 2 du National 2011 !  Didier Gourdaut qui a eu (malheureusement) son Maraud accidenté lors du National. Il  va m’initier à cette course d’endurance…On navigue ensemble pour la première fois.

Enfin, Didier G arrive et regarde ce que je crois devoir emmener dans le bateau. Il essaie de me convaincre d’éliminer le superflu. En effet, je suis habitué à naviguer en mer et j’ai évidemment tous le matos et même plus! « Trop lourd, trop lourd… » Qu’il me dit.
Ensuite, un petit contrôle intendance s’impose, mais là, pas de problème particulier.  
Didier G préfère ses voiles car elles sont neuves, mais va-t-on avoir une mauvaise surprise lors du gréement ?
Il me presse car le départ est prévu pour 14 heures aux Andelys (85 km, une ballade pour moi !)
Discussions pendant  le petit voyage… Exemple : tenue de route de voiture, pas de frein sur ma remorque mais on respecte les distances nous ne sommes pas pressés. Réception récente de ma carte grise de remorque de 1961 : J’ai la chance d’avoir eu lors de l’achat de mon bateau  la feuille barrée en rouge c’est le papier de conformité des mines, indispensable pour obtenir la carte grise...

Découverte du plan d’eau : un super plan d’eau avec deux îles au milieu et de bonne longueur et de bonne largeur (je ne connais pas les dimensions !). Un vent force 3 avec des pointes à 4 (peut-être à 5), le tout avec un beau soleil, la nuit ne sera pas trop froide. On va bien s’éclater ! 

Je prépare le bateau. Pour le matage, pas de problème ! Pour le gréement de Didier G avec son jeu de voiles, idem. J’installe mes diodes LED rouge et verte à l’avant des barres de flèches, 6 LED de chaque côté on va bien nous voir !!! Consommation totale ridicule 180 mA sous 12V (j’ai une batterie de 14 A de quoi tenir plusieurs jours !!). Ces LED sont sous forme de guirlande : dans une gaine plastique étanche, destinées à l’éclairage d’une piscine, elles ont 4 fils : un commun rouge vert bleu, si bien que  de la manière qu’on les alimente on obtient le rouge, le vert, le jaune et le blanc ! On peut couper la guirlande toute les 3 LED et ressouder quatre fils et mettre un peu de silicone. Attention ce n’est pas homologué marine. Mais le comité de course nous a demander d’avoir un éclairage peu importe lequel. D’ailleurs ceux qui utilisaient des lampes de secours homologuées avec une pile de 1,5 volt, au petit matin ils n’avaient plus de lumière.  Je mate avec mes chèvres de lever de mat, tout seul, pas de problème particulier.
Didier G m’a appris une très bonne astuce pour étarquer drisse de foc avec un hâle bas de grand voile.

Enfin prêt ! Didier me fait accélérer : il a raison, je traîne trop. 14 heures, le départ ! On ne rigole plus ! La mise à l’eau n’est qu’une formalité : la rampe est très pentue, pas besoin de casser la remorque.

Une petite réunion avec nos organisateurs. On est une vingtaine : il y aura 12 bateaux pour la course de 24 heures et 1 pour les 6 heures (Kevin et Simon).
Explication des drapeaux de départ. Ils s’assurent que tout le monde a un éclairage.
On devra noter notre nombre de tours et l’heure de passage des bouées de départ.
Le parcours est classique.
Règle simple : pas de collision !! On est là pour se faire plaisir, pas de forçage de priorité, ordre de nos organisateurs ! Et surtout de nuit gilet obligatoire ! La course va durer 24 heures
Départ est prévu pour 14 h 30.
Enfin on  va  régater,  il y a des gros avec nous ! Au top départ,  on se faufile et on passe dans les premiers.  Je suis super content  mais… on part pour 24 heures de course.
Il y a un super bon vent mais irrégulier en direction et en force qui nous occasionne de partir deux trois fois au lof.
Kevin et Simon nous talonnent avec son Hobbit. on va se suivre pendant toute la petite régate. Les deux bateaux ont des performances très proches. Mais moi, j’ai un génois et lui un spi et un foc, si bien qu’au vent arrière et petit largue il prend un peu d’avance. Mais on le reprend sur les autres allures. On le passera 3 fois sur 4 à la ligne de comptage. Le spi ne paie pas autant que ça par rapport à un génois. On fait des pointes de vitesse à 6  nœuds : on est à la limite de planer, d’après Kevin !
On a fait un essai avec  le spi mais le tangon n’est pas automatique et donc pas pratique à installer. Il fallait passer à l’avant sur le pont (pas terrible pour la sécurité : on va le voir tout à l’heure !). Didier G décide de ne pas l’utiliser. De toute façon, le vent change souvent de direction.

Il est évident qu’au bout d’un moment une envie pressante me vient. Donc je pars à l’avant du bateau sous le génois, mais on est vent arrière, la dérive relevée. Le bateau s’incline dangereusement, je suis obligé de lâcher sous peine de dessalage et là PLOUF !….dans l’eau !! Elle n’est pas froide heureusement mais pas très propre. La peinture  du pont est belle mais très glissante, je me jure  de faire quelque chose pour la prochaine fois.
Dans ma précipitation j’ai oublié dans ma voiture mes rechanges (grave erreur !)
Didier me prête un tee-shirt mais mon jeans est mouillé. Didier est inquiet pour la suite dans la nuit, il me demande si ça va aller, je lui réponds qu’on ne va quand même pas perdre du temps pour mes conneries ! Là on voit l’intérêt des gilets de sauvetage (au moins pour avoir chaud). Il y a du café chaud et de quoi boire manger pour deux jours (il y en a  plus qu’il n’en faut).

Kevin et Simon ne resteront que 4 heures, dommage on s’est bien amusé, ils seront classés derniers, mais l’important c’est qu’ils soient venus !

Maintenant on va discuter tous les deux de navigation pendant toute la régate.
Didier est un mordu : il ne lâche rien. Quand je suis à la barre il me fait surveiller en permanence les penons du génois. Dès que le vent change un tout petit peu de direction,
Didier G me dit « lofe, lofe ça adonne, abats, abats… allez vire ». Nos avis sont différents : je suis un habitué de la mer et lui du lac. Mais voilà tout l’intérêt de naviguer avec des personnes différentes, il va m’apprendre beaucoup de choses notamment  sur la stratégie de navigation et sur des modifications à apporter au bateau, position des taquets coinceurs du foc, position du mât etc.…

Avant de partir, j’avais fait une modification de la sortie du câble de remonter de la dérive qui s’est avérée d’une efficacité absolue : pas une goutte d’eau dans la cabine ! Avant je prenais un bon seau d’eau, voire plus, dans l’après-midi. J’ai une pompe de cale électrique mais ce n’est pas une solution.
Tout aurait été trempé et là on allait dormir dans la cabine.
Ma  modification est très simple : un presse étoupe à la sortie du câble suivie d’un tuyau diamètre 10  de 40 cm de long en plastique  souple transparent jusqu’à la première poulie en pentu vers le haut. Super efficace.

...suite...

Puis la nuit arrive. Pas de Lune, nuit noire. On allume nos feux de position : on est le bateau le plus éclairé de toute la flotte ! Avec un bel avantage : on voit parfaitement nos voiles.
Plus de vent du tout, la lune va montrer le bout de son nez : un tout petit croissant ridicule.
Un point important : les bouées sont marquées par les lampes flash mais une seule sur quatre restera éclairée toute la nuit d’où l’importance de posséder un GPS pour pouvoir les enregistrer. Nous n’en avons pas, les concurrents vont nous aider à les passer. On est là pour s’amuser, il est 2 heures du matin Didier G va se reposer. Il va dormir 2 heures et même bien dormir !! Le vent est tellement faible, même nul que seule la fumée de mon cigare m’indique la direction du vent. Je peux même faire des ronds avec la fumée peut être le seul sport où il serait intéressant de fumer !!!  Il est très difficile de maintenir un cap deux fois, le bateau part complètement en travers face à la berge sans pouvoir le redresser à la barre. Il me vient alors une idée pour le redresser : le faire giter exagérément et ça marche ! Il réagi bien. Il faut conjuguer la gîte et la barre et tout rentre dans l’ordre.

La nuit, le lac est loin d’être silencieux : il y a un vacarme incroyable fait par les grenouilles et les crapauds, les oiseaux et même les poissons qui sautent pour attraper les insectes. On a de la chance il n’y a pas de moustique, la pollution de l’eau a peut être du bon !!!   Vers le milieu de la nuit, le brouillard se lève. Il va être très difficile de voir les bouées et même impossible. J’ai deux grosses lampes torches de très forte puissance pour chercher les bouées mais dans le brouillard elles restent inefficaces. Je navigue au pif ! Didier G se réveille et prend ma place.

Au petit matin (vers 8 heures) les organisateurs ont du mal à trouver les bateaux : il y a toujours du brouillard. Ils nous apportent des croissants (c’est sympa). Ils n’ont pas retrouvé un concurrent mais par contre ils ont réveillé un bateau qui n’était pas dans la course : bonne rigolade !!

La course se finit à 14h30. On a effectué 15 tours en tout, pour seulement deux dans la nuit.
Notre record de vitesse : 34 minutes pour un tour de jour. Le même tour dans la nuit 4h50. Pas très rentable mais ce fut quand même une très bonne expérience à faire. Cela m’a permis de voir plusieurs problèmes.

Dimanche, Il y a un peu moins de vent que le samedi. On arrête un peu avant les 14h car on n’aurait pas fini le dernier tour pour 14h30.

On accoste mais là il y a une chaine qui barre la mise à l’eau Didier G part chercher la propriétaire du lac. Bon je gare mon attelage dans la descente et j’attends  le retour de    Didier G. Je vois la propriétaire arriver qui me dit sur un ton moyennement aimable  de ne pas rester là !!! Elle ouvre le cadenas et me dit surtout de le refermer derrière  moi
Didier G arrive. Il me dit d’aller me garer plus haut vers la cabane de Club. Donc je pars doucement avec le bateau maté pour aller me garer sur le bord de la route.
Je sors de ma voiture et m’approche du bateau quand Didier arrive à ce moment là. Tout s’est joué à quelques secondes près. Il me dit :

 «  TU AS VU QUE TON MAT EST EN CONTACT SUR LES FILS ELECTRIQUES »

    Je lui ai répondu :

 « SURTOUT  N’APPROCHE PAS »

Là voilà ma chance du jour : Didier G vient de me sauver la vie !!!

Je réfléchis : si j’ai pu descende de ma voiture sans prendre de bourre,  je dois pouvoir y remonter. Donc je remonte, je manœuvre prudemment et je me gare en face de la route.

Pourquoi je n’ai pas pris de bourre en sortant de ma voiture : mon bateau a une épontille EN BOIS  qui appuie sur le saumon ! Si j’avais eu le bateau de Kevin, je serai mort. Son bateau a un arceau en  tube en acier sous le pied de mat et qui va appuyer sur le saumon, le tout sur la remorque reliée à la voiture.
La ligne que j’ai touchée est une moyenne tension elle doit être de 25000 VOLT. Autrement dit : « tension amorçage : 25 millimètres » 

Rappelez vous : TENSION D’AMORCAGE 1000 VOLT PAR MILLIMETRE

Autrement dit si j’avais approché la  main d’un hauban, avant que je le touche j’aurai pris la bourre 25 millimètres avant. Pour être en sécurité il faut doubler la distance.

Exemple :
 Les lignes de très haute tentions  distance minimum est de 6 mètres  d’après l’EDF

Autre exemple la foudre un éclaire de 1 km est égale à 1000 000 000 Volts et oui un milliard de Volt ça explique pourquoi on ne n’est pas prés de  domestiquer le phénomène !

Bon après cette mauvaise aventure tout rentre dans l’ordre.
On commence à ranger le bateau on est très fatigué le stress est retombé  mon ami a mal au dos, problème de vertèbre il regrette de ne pas avoir pris sa ceinture.

On a fini, on se rapproche du club  des Andelys. Il est environ 16h
Et on revoie nos organisateurs pour l’annonce des résultats, évidement dans une ambiance bonne enfant.
Le premier a fait 18 tours un solitaire très méritant et surpris de son résultat. Ca fait plaisir à voir. 
Et nous 15 tours on est 6eme sur 12 je suis un peu déçu sur le coup mais Didier G me dit que ce n’est pas mal.
Ils ont prévu un super barbecue avec beaucoup chose à manger un repas de roi.
Les préparatifs des bateaux nous laissent pas le temps de discuter avec nos concurrents.
Toute fois le repas permet enfin de se connaître, pour vous donner une idée de l’ambiance, comme dans la bande dessinée d’Astérix et Obélix à la fin de leur aventure.

Fin des aventures, bonjour les courbatures et  à l’année prochaine avec plus de Maraudeur.


                                                 Didier Riand   Didier Gourdaut